
Jean-Pierre.
Sur l'état civil, c'était son second prénom.
C'était aussi son "nom d'artiste" comme il disait. Un artiste polymorphe : écriture, peinture, humour, musique, et j'en passe.
La musique, on en jouait ensemble depuis plus de 20 ans. C'est d'ailleurs lui qui a choisi le nom de notre groupe : La Dent Noire. Tout un programme.
Le soir de son départ, nous étions en concert.
Comme d'habitude, il a fait le clown dans la voiture. Comme d'habitude, on a refait le monde. Il nous a parlé du dernier bouquin qu'il a lu, sur "le capitalisme de surveillance". Il a blaguait. Il a fait de nouvelles rencontres. Il a vendu son parpaing. Bref, comme d'habitude, c'était génial : Ça l'était tout le temps en sa compagnie.
Comme souvent, depuis sa première opération cardiaque, il nous a parlé de sa mort : « Les gars, il ne me reste pas 10 ans à vivre. ». Ça faisait 15 ans qu'il nous le répétait... Les calculs, c'est pas notre fort.
En cours de concert, à la fin d'un morceau, il a dit qu'il ne se sentait pas bien. On a tout arrêté et on est sorti prendre l'air. Il n'arrivait pas à "redescendre". Un ami d'ami, médecin urgentiste, l'a aussitôt encadré. Il l'a écouté, il l'a apaisé et à fait tout ce qu'il y avait à faire jusqu'à ce que Jean-Pierre ferme les yeux une dernière fois.
Jean-Pierre aurait voulu qu'on fasse son éloge funèbre de son vivant. Il trouvait ça plus utile.
Les bons mots, c'était sa spécialité, pas la notre. Alors plutôt qu'un éloge, on se contentera de répéter quelques mots qu'il a déjà entendu :
On t'aime.
La Dent Noire